Tarjei VESAAS
Romancier, nouvelliste et poète, né le 20 août 1897 à Vinjem (dans le Telemark) et mort le 15 mars 1970 à Oslo, Tarjei Vesaas, fils de paysan pris dans la gangue de la terre, la prééminence du sol, hésita longtemps entre le métier de son père et l’écriture. Il écrit (en néo-norvégien (nynorsk), langue autrefois connue sous le nom de « langue rurale »), dès les années vingt, mais n’atteindra une notoriété nationale et européenne qu’en 1934, avec Le Grand jeu; puis viennent les années de guerre, la peur et la violence (Le Germe, La Maison dans la nuit). La frontière entre la vie et la mort est abolie, Vesaas écrit toujours au-delà des apparences. Parmi les grands romans d’après-guerre, deux chefs-d’œuvre : Les Oiseaux et Le Palais de glace. Son œuvre est dominée par les thèmes existentiels du Mal, de l'Absurde, ainsi que par l'omniprésence de la Nature. Elle se caractérise par une forte dimension symbolique et onirique (À qui parlons-nous lorsque nous nous taisons ?) On peut dégager quatre périodes dans l'œuvre de Vesaas. La première, la période romantique, s'étend de 1923 à 1927. La deuxième, après ses différentes bourses, qui lui permettent de faire des voyages à travers l'Europe, est une période naturaliste, de 1927 à 1940. Elle débute par le roman Les Chevaux Noirs (1928), le cycle de Dyregodt (quatre volumes, entre 1930 et 1938), le roman L'Arbre de Santal (Sandeltreet, 1933) et le diptyque de Per Bufast, entamé par Le Grand Jeu (Det store Spelet), en 1934, année de son installation à la ferme de Midtbø. Vesaas donne aussi des pièces de théâtre et des livres de nouvelles. Le roman Kimen marque le début d'un renouveau du symbolisme, de 1940 à 1945, avec, principalement, les deux romans écrits durant la guerre (Vesaas dénonce la violence et le fascisme), Le Germe (Kimen, 1940) et La Maison dans les Ténèbres (Huset i Mørkret, 1945). La dernière période voit le symbolisme de Vesaas atteindre sa pleine maturité, son plus haut stade, avec des ouvrages tels que, Les Oiseaux (Fuglane), L'Incendie (Brannen), Le Palais de glace (Is-Slottet), Les Ponts (Bruene) ou La Barque, le soir (Båten om Kvelden). Là où ses romans, ses nouvelles ou ses pièces de théâtre proposent une fragmentation du réel, une représentation volontairement limitée des stratégies initiales d’approche du vide et de l’éternel, des escarmouches du bien et du mal et de l’affrontement terminal entre le néant et le désir de vivre, les poèmes de Vesaas (réunis en français dans Être dans ce qui s'en va) recomposent eux l’éphémère totalité de l’expérience humaine dans son unique et vain cheminement. Rares sont les créateurs d’une œuvre plurielle à avoir ainsi trouvé dans la Poésie le regard ultime de leur recherche formelle. Il est quasiment exceptionnel qu’un écrivain « classique » se soit décidé à considérer le passage par la forme poétique comme un viatique indispensable au dernier affrontement. Il fallait pour cela un paysan du Telemark, fier de sa terre, inébranlable dans sa foi et si soucieux de la dureté du monde. Tarjei Vesaas est avec Knut Hamsun, le plus grand auteur norvégien du XXe siècle. A lire : L'incendie, traduction de Régis Boyer, (Flammarion, 1979, réédité en 1992), Palais de Glace, traduction d’Élisabeth Eydoux, (Flammarion, 1975, réédition 1993), La Maison dans les ténèbres, traduction d’Élisabeth et Éric Eydoux, (Flammarion, 1993), Le Vent du Nord (La Table Ronde, 1993), Le Germe (Le livre de Poche, 1993), L'arbre de Santal (Actes Sud, 1994), La Blanchisserie, traduction d’Élisabeth et Éric Eydoux, (Flammarion, 1997), Une Belle journée, traduction d’Élisabeth et Éric Eydoux, (Le Passeur, 1998), Les Chevaux noirs, traduction de Jacqueline Le Bras, (Actes Sud, 1999), Les Oiseaux, traduction de Régis Boyer (Oswald, 1975. Réédition Plein Chant, 2000), Les Ponts, traduction d’Élisabeth et Christine Eydoux, (Gallimard, 1971. Réédition Autrement, 2003), La Barque, le soir, traduction de Régis Boyer, (Corti, 2003), Être dans ce qui s'en va, édition bilingue, traduction du néo-norvégien d'Eva Sauvegrain et Pierre Grouix, (Rafael de Surtis-Editinter, 2006).
Pierre GROUIX
(Revue Les Hommes sans Epaules).
Publié(e) dans la revue Les Hommes sans épaules
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Dossier : POÈTES NORVÉGIENS CONTEMPORAINS n° 35 |